janvier 6th, 2012 Le Projet

La monarchie parlementaire : une idée révolutionnaire.

 

L’élection du président de la république au suffrage universel direct perturbe, voire pollue, la vie politique de la France pendant au moins la moitié du quinquennat et la monopolise pratiquement pendant un an.

D’ abord,  cette élection est  une aberration politique dans la mesure où elle aboutit à créer deux représentations nationales. Système bien peu rationnel et unique au monde.

Ensuite cette élection est intrinsèquement dangereuse dans la mesure où elle est porteuse de deux risques : l’autocratie si le parlement et le président sont du même bord et l’immobilisme s’ils sont en opposition.

Le président est naturellement le leader d’un parti.  Dans le contexte politique français, agressif et peu consensuel, il demeure pendant tout son quinquennat le chef d’une fraction de la population avant d’être le représentant fédérateur de la nation.

La fonction présidentielle a eu – naturellement–  tendance à dégénérer depuis sa création en 1965, ayant été taillée sur mesure pour un homme  exceptionnel dans un contexte exceptionnel.

La dernière campagne présidentielle a été l’illustration de la dérive du système en aboutissant à l’élection d’un homme en quête effrénée de consensus  et finalement rejeté par plus des deux tiers de la population dans les dernières années de son mandat. Il en aurait été probablement de même, voire pire, si sa rivale avait été élue.

Peut- on reprocher à une partie importante des citoyens français de refuser de se reconnaître dans un président qui  les a combattus tout au long de sa campagne, quand ce n’est pas tout au long de sa vie publique ?  Qui va dorénavant  représenter cette partie conséquente de la population ?

En réalité la dérive tient au système lui-même et illustre l’adage qui veut que tout homme de pouvoir (ou homme au pouvoir) a tendance à en abuser. Plus particulièrement en France peut être, pays dans lequel tout homme politique a tendance à mépriser celui qui ne pense pas comme lui.  Voltaire le savait déjà, lui qui  voyait déjà dans la monarchie parlementaire le moyen de lutter contre cette pernicieuse attitude.

Par ailleurs, il n’est pas possible, quelles que soient ses qualités intellectuelles et sa puissance de travail, que le président puisse successivement et correctement consoler la famille d’une jeune fille assassinée, diriger nos troupes sur le théâtre des opérations extérieures, présider leG20, téléphoner au premier ministre d’un pays ami, présider le conseil des ministres, recevoir les marins en colère, définir la stratégie de son parti d’origine, remettre trois Légion d’honneur, dîner avec le roi du Maroc et honorer correctement son épouse….

La gouvernance à la française devient une aberration et, qui plus est, un gage de surcoût compte tenu du fait qu’un micro gouvernement élyséen a naturellement tendance à doubler celui issu des institutions.

 

******************

On peut être surpris qu’il n’y ait, dans le personnel politique de droite comme de gauche, pratiquement personne pour relever cette dérive qui se confirme comme telle d’année en année.

En réalité tout le personnel politique, directement ou indirectement, a partie liée avec le système.  Pas un homme ou femme politique qui n’ait son champion candidat ; il le soutient et est soutenu par lui.

Aborder, ne serait-ce même qu’évoquer, la dérive de la fonction présidentielle de la Ve république, c’est tout simplement contester le pouvoir messianique du candidat avec lequel on a – ou on va avoir -  partie liée.

D’ailleurs la majorité des déclarations du personnel politique français (députés et sénateurs confondus) est présentée à l’aune de la position prise par son candidat favori. La vie politique en France est tronquée par cette situation qui n’existe pas dans les autres démocraties européennes.

Enfin la presse et les médias sont trop heureux de donner l’impression qu’ils jouent dans la cour des grands (de ce monde …) Les jugements à l’emporte-pièce des journalistes et des chroniqueurs de tous poils donnent à ces derniers et à leurs lecteurs l’illusion de peser sur les débats à leur plus haut niveau. Alors qu’ils ne font que participer à la désacralisation de la fonction présidentielle…

D’un autre côté, la critique ou la louange d’un président omnipotent, et surtout omniprésent, est de nature à simplifier à l’extrême l’analyse politique de notre pays en la cristallisant autour de l’image d’un homme et, par là, d’en renforcer le manichéisme.

 

******************

Face à ce constat ma proposition est la suivante :

« Créer un choc dans les esprits à l’occasion de la présente campagne présidentielle. »

De toute façon, quelle qu’en soit l’aboutissement, il serait sain, et donc utile, d’apporter d’autres propositions que celles issues des résultats des études de marché commandées par les conseillers politiques des différents candidats. Ces études sont d’ailleurs destinées essentiellement  à renforcer la conviction de ces derniers qu’il n’y a pas de meilleure solution pour la France que de les installer dans les chaussons de l’actuel président de la république.

Il sera donc proposé à l’un des candidats à la présidence  de véhiculer l’idée choc suivante :

   «  Cette élection présidentielle est la dernière de la Ve République. »

La mandature du prochain président s’achèvera avec la mise en place de nouvelles institutions issues d’un référendum à l’occasion duquel le peuple français se prononcera sur 3 options :

1 ) Régime présidentiel actuel.

2 ) Régime république parlementaire.

3 ) Régime monarchie parlementaire.

 

Et d’insister surtout sur le fait que d’ores et déjà on a une préférence pour la solution numéro trois. Et ceci pour deux raisons :

  • La première raison : Cette idée apparaîtra finalement beaucoup plus révolutionnaire que réactionnaire et, impliquant une certaine polémique, elle donnera lieu à des débats beaucoup plus élevés et plus riches qu’un questionnement sur les avantages et inconvénients d’un régime plus ou moins présidentiel ou plus ou moins parlementaire.
  • La deuxième raison : Justement, si on élimine l’aspect polémique du sujet, on constate rapidement qu’il s’agit du régime qui cumule le maximum d’avantages.

 

Être roi, c’est un état, c’est une fonction et c’est un métier.

  •  C’est un état.

Point de démagogie, point de surenchère, point d’élection. Le roi représente la France, les Français, l’État. Il est naturellement le premier des Français. Il relègue de facto à la deuxième place le chef du gouvernement qui ne sera jamais rien d’autre qu’un serviteur de l’État, le responsable d’une équipe et l’exécuteur d’un programme élaboré par la majorité parlementaire.

Ainsi l’égo plus ou moins surdimensionné de tous les candidats au poste de la plus haute responsabilité éligible n’aboutira jamais à autre chose qu’à celle du premier ministre c’est-à-dire second personnage de l’État, ce qui est déjà remarquable mais dénué de toute fonction sacramentelle…

  • C’est une fonction

Le roi symbolise l’unité nationale et représente l’ensemble des composantes de la nation, minorités et majorités réunies. Il n’appartient à aucun parti, et il n’a donc pas à être élu. Il est un élément fédérateur dans le temps (il représente la continuité et la pérennité de l’État) et dans l’espace.

  • C’est un métier

Son travail consiste à donner la meilleure image du pays autant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Il n’a pas à surenchérir ou à négocier des compromis. Il peut prendre tout le recul exigé par sa fonction et agir dans le cadre qui lui a été défini par la constitution.

 

Dans un régime de monarchie constitutionnelle, les fonctions de représentation de l’État et celles de chef du gouvernement sont clairement et constitutionnellement séparées.

Les monarchies européennes sont, quasiment toutes, des exemples de démocratie.

Il n’y a pas de doute que le passage de la république à une monarchie parlementaire apaisera le climat politique de la France.

Bien mieux, il sera un gage de sérénité et de continuité au cas où les prochaines élections devaient aboutir à placer en tête du premier tour  – et plus encore bien sûr en tête du second tour – un candidat totalement rejeté par l’autre camp.

Enfin,  en rapprochant son régime de ceux de la plupart des autres états européens, la France donnera un signe lisible de sa volonté de renforcement des structures politiques de l’Europe.

 

*****************

 

Pourquoi la France populaire – de gauche comme de droite  – est elle prête à entendre un tel discours ?

Ce sera la première fois depuis bien longtemps qu’un homme politique se placera  en retrait par rapport au projet qu’il soutient. Et cela, les Français adoreront.

Le candidat pourra apparaitre autant comme candidat de gauche que comme candidat de droite : en tous les cas comme dépassant très largement les clivages gauche – droite.

En effet sa finalité ne sera pas l’avènement d’un régime de droite ou de gauche mais la mise en place d’une institution qui permettra à la droite comme à la gauche de s’exprimer de façon plus claire.   Il lui sera par conséquent plus facile de puiser à droite comme à gauche les idées les plus consensuelles, les plus évidentes et les plus efficaces pour répondre à la situation du moment.

 

Un tel positionnement sera accepté à gauche comme à droite.

La France d’en bas a toujours été plus proche du roi que la bourgeoisie lettrée ou libérale. Et le candidat exposant cette idée touchera un important électorat populaire qui le distinguera de ses rivaux de gauche au profil intellectuel et pratiquement tous issus du sérail.

En avançant sur ce terrain  ce candidat déstabilisera une grande partie de la droite et se détachera de l’image sectaire que la majorité des électeurs de droite colle à la plus part des hommes politiques de gauche.

D’autre part, plus d’une personne sur deux appartenant à la classique mouvance de droite se déclare à titre personnel favorable à une représentation monarchique plutôt que présidentielle. Cependant la plupart du temps elle s’empresse d’ajouter comme pour en atténuer la portée qu’elle ne pense pas que la France serait prête à franchir le pas.

Et si l’on persiste à leur demander de citer des pays dans lesquels les choses semblent mieux se passer qu’en France, la quasi totalité est amenée à citer une monarchie parlementaire.

Et puis, cerise sur le gâteau,  le dit candidat bénéficiera sans même les solliciter des deux tiers des voix de l’électorat du Front National.

 

En tout état de cause le postulat de cette démarche repose sur le fait que le candidat qui abordera les élections présidentielles avec une idée aussi saugrenue, aussi inattendue, aussi spectaculaire et aussi polémique apparaitra  comme l’animateur et  l’antidote au climat mortifère d’une campagne présidentielle déjà largement amorcée.

Au fil des semaines et des mois de campagne cette idée, réellement originale et constructive, sera susceptible de s’intégrer au débat politique et d’apparaître comme une alternative intéressante voire souhaitable par une importante, voire très importante, partie de l’opinion publique.

 

Une stratégie.

Reste que sur le plan stratégique, il apparaît souhaitable d’aborder cette campagne présidentielle avec l’objectif « provocateur » d’une monarchie parlementaire qui suscitera beaucoup plus d’intérêt et de polémiques que celui d’un simple abandon de l’élection du président de la république au suffrage universel . Une campagne sur ce thème apparaitrait à la plupart des gens comme à une volonté de retour aux institutions de la quatrième république.

En effet si l’instauration d’une monarchie parlementaire devait apparaître trop révolutionnaire ou même  inappropriée  à certains destinataires de cette note, ils sont tout de même ardemment invités à donner une suite favorable à cette proposition dès lors qu’ils sont convaincus que le système actuel n’est réellement pas satisfaisant pour la France et les Français.

Aussi disons-le simplement : à défaut d’une monarchie, une république parlementaire classique telle qu’elle existe en Allemagne, en Autriche ou en Italie (n’oublions pas qu’avec un système à la française, Sylvio Berlusconi serait président de la république…..) constituerait déjà un remarquable progrès pour renouer avec la cohésion nationale, lutter contre la fracture sociale et décrisper le paysage politique français.

La gouvernance du pays serait éclaircie,  les institutions plus efficaces, la séparation des pouvoirs mieux assurée, les économies en termes budgétaires évidentes et surtout, surtout, il existerait en France un personnage qui aurait comme fonction suprême et unique de représenter l’ensemble des Français.

Une telle perspective ne mérite-t-elle pas la démarche sollicitée, même auprès des républicains convaincus ?

 

Enfin si l’on ne profite pas de cette période préélectorale pour s’impliquer dans l’expression d’une idée forte dont on peut décemment penser qu’elle sera bénéfique pour notre pays, quand le fera-t-on ?

 

François Pasquier.

 

(1)   Je demande au lecteur du présent document de faire abstraction de la question dynastique qui, dans mon esprit, sera tout simplement et démocratiquement réglée par le choix des assemblées parlementaires réunies en congrès. La personnalité du roi sera certes très importante mais elle demeurera l’accessoire à la nouvelle légitimité monarchique issue du referendum. Il en sera de même aux cas où ce dernier aboutirait au choix d’un président de la république fédérateur.