janvier 1st, 2012 Election présidentielle

En finir avec la monarchie républicaine

L’élection présidentielle en France va encore une fois mettre en effervescence la quasi-totalité des médias. La présidentialisation de la vie politique française, pour ne pas dire sa personnalisation, va battre son plein jusqu’à l’élection les 22 avril et 6 mai 2012. Conséquence : on a tendance à oublier qu’un mois et demi plus tard, en juin 2012, auront lieu les élections législatives.

En effet, depuis le raccourcissement du mandat présidentiel de sept à cinq ans et l’inversion du calendrier électoral en 2002, les mandats de députés et de Président de la République ont la même durée, cinq ans. En outre, sauf s’il y a une dissolution de l’Assemblée nationale par le Président de la République, l’élection de ce dernier précède celle des députés de quelques semaines.

L’Assemblée nationale a tendance à devenir un sous-produit de l’élection présidentielle, comme si, après avoir élu un Président, certes soutenu par un parti politique, l’électeur ne pouvait que confirmer ce choix lors des élection législatives. La majorité à l’Assemblée nationale devient alors une majorité présidentielle, une majorité « godillot », dont les députés récalcitrants se font sermonner et « recadrer » par le « Château » dès qu’ils manifestent quelques velléités d’indépendance ou font preuve d’initiatives qui déplaisent à notre monarque républicain.

Certes, le Président de la République dispose du pouvoir de dissolution, mais c’est quand même l’Assemblée nationale qui exerce la souveraineté nationale, en dehors des référendums. Comme on l’a vu lors des différentes cohabitations politiques sous la Vème République, le Président doit choisir le chef du gouvernement au sein de la majorité à l’Assemblée nationale, au risque de le voir désavoué à la première motion de censure.

« La souveraineté nationale appartient au peuple, qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. »
Article 3 de la Constitution française de 1958

Depuis son introduction dans la vie politique française, il y a cinquante ans, l’élection présidentielle est devenue un concours médiatique qui démarre deux ans avant l’échéance, où priment les petites phrases, les tactiques individuelles, la forme par rapport au fond. Les stratégies à long terme et les projets d’avenir pour répondre aux grands enjeux de la société passent au second plan au détriment de l’intérêt général

« Il y a cette particularité française : l’élection présidentielle rend la classe politique folle. »
Daniel Cohn-Bendit

Pour éviter cette personnalisation désastreuse de la vie politique française qui tend à faire de la France une monarchie républicaine, il faudrait revenir à un régime où le Président se contente de présider et d’être le chef d’Etat, garant de la continuité de l’Etat, avec une élection au suffrage indirect pour restituer à l’Assemblée nationale toute sa légitimité. N’oublions pas que c’est la première élection présidentielle au suffrage universel qui a abouti au coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte du 2 décembre 1851.

En attendant de changer de Constitution et par la même occasion de République, on pourrait soit fusionner le calendrier électoral en procédant aux élections législatives le même jour que la présidentielle. L’avantage serait de simplifier le calendrier électoral, de « dégonfler » l’importance donnée à l’élection du Président et de redonner aux élections législatives leur rôle de fixation des orientations politiques pour la France. Une autre solution serait dedécaler d’un demi mandat les élections législatives par rapport à l’élection présidentielle.

Pierre Tourev, 10/07/2011